Des MOF, des structures moléculaires poreuses et polyvalentes
Le prix Nobel de chimie 2025 est attribué à Susumu Kitagawa, Richard Robson et Omar M. Yaghi pour leurs travaux sur les structures métallo-organiques, connues sous le nom de MOF (metal-organic frameworks). Ces réseaux offrent de grands espaces internes par lesquels peuvent circuler gaz et autres substances chimiques, ouvrant des perspectives pour des projets liés au climat et à l’environnement.
Le trio et ses affiliations
Susumu Kitagawa est affilié à l’Université de Kyoto, au Japon. Richard Robson est associé à l’Université de Melbourne, en Australie, et Omar M. Yaghi est originaire d’Amman, en Jordanie, et travaille à l’Université de Californie à Berkeley. Ensemble, ils ont développé des architectures moléculaires qui ont permis de concevoir des milliers de MOF différents et d’envisager des applications variées.
Une architecture inspirée du diamant
Richard Robson s’est inspiré de la structure du diamant, où chaque atome de carbone est lié à quatre autres selon une géométrie pyramidale. En remplaçant le carbone par des ions cuivre et une molécule à quatre bras terminée par des groupes nitrile, il a obtenu un cristal ordonné et très spacieux. À l’époque, beaucoup de chimistes auraient pu douter de l’utilité de cette approche, mais Robson prévoyait déjà son potentiel structurel pour des matériaux futurs.
Kitagawa et Yaghi : des avancées qui forment le socle des MOF
Entre 1992 et 2003, Susumu Kitagawa et Omar Yaghi ont contribué à des découvertes majeures qui ont solidifié le cadre des MOF. Kitagawa a exploré des structures poreuses, parfois flexibles, capable de changer de forme selon le remplissage ou le vidage en gaz. En 1997, il présente une MOF traversée par des canaux ouverts pouvant être remplis de différents gaz sans altérer la structure, et en 1998 il montre que ces matériaux peuvent être formés à partir de divers types de molécules tout en restant souples.
MOF-5 et l’essor d’une catégorie de matériaux
De son côté, Omar Yaghi a adopté une approche modulaire pour assembler des composants chimiques comme des pièces de Lego, permettant de créer de grands cristaux. En 1995, il décrit des structures bidimensionnelles soutenues par des métaux tels que le cuivre ou le cobalt et capables d’emprisonner des molécules; ces matériaux résistent à des températures élevées et ne s’effondrent pas. C’est dans ce cadre qu’il introduit le terme « structure métallo-organique » dans une publication de Nature, pour décrire ces matériaux étendus et poreux formés par des métaux et des molécules organiques. En 1999, MOF-5 se distingue par sa stabilité et ses cavités cubiques: quelques grammes peuvent offrir une surface équivalente à celle d’un terrain de football. Par la suite, Yaghi et ses collaborateurs démontrent qu’il est possible de modifier les MOF de manière rationnelle, donnant naissance à une famille variée de matériaux, dont 16 variantes de MOF-5 avec des cavités de tailles différentes. Certaines variantes promettent des capacités de stockage de gaz et des applications potentielles dans le domaine énergétique.
Impact et perspectives des MOF
Les structures métallo-organiques ont suscité un intérêt mondial, avec la création d’un ensemble de composants moléculaires servant à concevoir des MOF adaptés à diverses missions. Des recherches ont montré que ces matériaux peuvent être utilisés pour capter l’eau contenue dans l’air, notamment dans des environnements arides, et pour des applications liées à la capture du CO2, au stockage de gaz et à la catalyse de réactions chimiques. Cette démarche est présentée comme un pas significatif vers des solutions innovantes pour le climat et l’environnement. Le Comité Nobel souligne que les travaux de Kitagawa, Robson et Yaghi ont apporté « le plus grand bénéfice à l’Humanité », marquant une étape clé dans le développement des MOF et leur potentiel pour le XXIe siècle.